Algerian Air Force Forum

Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Algerian Air Force Forum

Communauté de discussion sur l'Algérie Moderne

-55%
Le deal à ne pas rater :
Coffret d’outils – STANLEY – STMT0-74101 – 38 pièces – ...
21.99 € 49.04 €
Voir le deal

    La réunion du GPRA du 29 juin au 10 juillet 1959

    valiant
    valiant
    Arif
    Arif


    Nombre de messages : 305
    Localisation : Quebec
    Date d'inscription : 21/05/2007

    La réunion du GPRA du 29 juin au 10 juillet 1959 Empty La réunion du GPRA du 29 juin au 10 juillet 1959

    Message  valiant Dim 1 Juil 2007 - 20:43

    quotidien oran 1 juillet07


    La réunion du GPRA du 29 juin au 10 juillet 1959 L'année 1959 a été très difficile pour la Révolution
    par Ali Chérif Deroua*

    Sur le plan intérieur, les opérations militaires du Général Challe qui avait reçu un accord signé de la main propre du Général De Gaulle lors d'une de ses visites d'inspection sur le terrain (1), ont débuté par l'opération Couronne en Wilaya 5 du 1er février au 30 mars 1959. L'armée française avait mis le paquet, vingt mille hommes rassemblant les unités de parachutistes affectées à d'autres zones, transportées par une flottille d'hélicoptères et agissant sur renseignements.

    Puis le 18 avril il déclencha l'opération Courroie en Wilaya 4 avec les mêmes forces mises au repos pour deux semaines et les mêmes moyens qui durera jusqu'au 20 juin visant surtout les monts de Blida et l'Ouarsenis.

    Le 21 juillet c'est l'opération Jumelles en Wilaya 3 avec les mêmes forces aguerries par l'expérience et un débarquement de troupes au Cap Sigli qui prendra fin le 6 septembre.

    Le 7 novembre débutait l'opération Pierres Précieuses en Wilaya 2. Elle n'a pas donné les résultats escomptés à cause du mauvais temps et aussi de la décision des responsables de cette Wilaya d'éparpiller les forces par petits groupes et éviter tout accrochage si possible.

    Ces opérations «rouleaux compresseurs» avaient pour but la destruction et l'anéantissement de l'Armée de Libération Nationale et de son Organisation.

    Elles devaient se poursuivre en Wilaya 1 début 1960, mais après l'insurrection des barricades, l'intervention du Général de Gaulle sur ce sujet et le rappel du Général Challe en France, cette opération malgré un début d'exécution, a été reportée sine die.

    D'autre part, le 28 mars 1959 en route pour Tunis, les colonels Amirouche et Haouès tombaient au champ d'honneur.

    Enfin, les Français avaient bouclé les barrages électrifiés sur les frontières Est et Ouest de l'Algérie et il était très difficile de ravitailler en armement les forces de l'intérieur.

    Sur le plan extérieur, le GPRA était confronté aussi en son sein, à une crise avec la démission de Lamine Debaghine de son poste de ministre des Affaires étrangères suite à la mort de Allaoua Amira.

    Début mai 1959, des incidents graves s'étaient produits à la frontière en Tunisie entre des éléments de l'ALN et l'armée tunisienne faisant état de morts de part et d'autre.

    Auparavant, au mois de novembre 1958, l'affaire Lamouri avait créé un malaise entre le GPRA et l'Egypte.

    C'est dans un climat pour le moins critique et morose que le GPRA se réunit le 29 juin 1959.

    La veille, Boussouf m'informa de me préparer pour être le secrétaire de cette réunion. Je compris alors pourquoi deux semaines auparavant, il m'avait demandé de suivre des cours de sténo. Il avait suggéré à ces collègues l'enregistrement des débats, ce qu'il n'a pu obtenir, Abbas et Krim étant contre.

    Dans la salle de réunion, il y avait une table carrée avec onze sièges et au fond à droite un petit bureau qui m'était réservé. Le 29 juin à 9 heures, je me suis pointé au deuxième étage du siège du GPRA, étage où se trouvaient les bureaux de la Présidence.

    Il y avait déjà le Président Abbas et Boussouf qui avaient pris leur place. Les autres prenaient place au fur et à mesure de leur arrivée.

    Autour de la table, face à la porte d'entrée, il y avait Ferhat Abbas avec à sa droite Krim Belkacem, côté droit Benyoucef Benkhedda, Mahmoud Chérif, Ahmed Francis, en face du Président, Abdelhafid Boussouf, Lakhdar Bentobbal, Abdelhamid Mehri, puis côté gauche Mhamed Yazid, une chaise vide prévue pour Lamine Debaghine et Tewfik El-Madani.

    Ferhat Abbas ouvrit les débats en regrettant l'absence de Debaghine, demandant à ses ministres s'il n'était pas préférable de reporter la réunion au lendemain afin de faire revenir ce dernier sur sa décision de ne pas y assister.

    Il faut signaler que Debaghine avait présenté sa démission du gouvernement le 15 mars 1959, que celle-ci a été retenue, en attendant de la soumettre au prochain CNRA. La nouvelle n'a pas été ébruitée pour sauvegarder l'unité de la direction.

    L'ordre du jour était :

    Bilan de 9 mois de gouvernance;

    Situation à l'intérieur du pays;

    Problèmes avec les pays frères Tunisie, Maroc, Egypte;

    Démission Debaghine;

    Convocation congrès du CNRA et désignation de ses membres.

    Après la présentation de l'ordre du jour, Abbas a donné la parole à Krim qui rejeta l'ordre du jour et demanda un changement de gouvernement, critiquant la mauvaise gestion de Ferhat Abbas et demandant la démission du dit gouvernement.

    Tous les ministres savaient que Krim ambitionnait de présider le nouveau gouvernement et qu'il n'avait aucune chance d'y parvenir, Boussouf et Bentobbal s'y opposant d'emblée.

    Tour à tour, Benkhedda, Francis et Mehri prirent la parole pour défendre le gouvernement et contrer la demande de Krim. Yazid et El-Madani se sont abstenus d'intervenir, Boussouf et Bentobbal semblaient non concernés, chuchotant entre eux des paroles inaudibles aux autres. Le Président Abbas en accord avec la majorité des membres demanda une suspension des travaux afin de calmer les esprits.

    Après une journée de tractations et de négociations, le gouvernement se réunit de nouveau, soit le 1 juillet 1959.

    Dès le début des discussions, l'incident le plus grave eut lieu entre Mahmoud Chérif et Krim. Ce dernier lui reprochait de ne pas le soutenir, lui rappelant qu'il lui devait sa promotion en tant que colonel de la Wilaya Une, puis de membre du Comité de Coordination et d'Exécution puis de ministre de l'Armement Général. Mis en cause dans la situation à la frontière tunisienne, Mahmoud Chérif s'en prit à son collègue en des termes sévères: le désordre aux frontières c'est toi, le complot de Lamouri et son exécution c'est toi, la désertion de Hambli et ses 130 djounouds c'est toi... etc. etc. Ils en arrivèrent même aux menaces telles que «je te briserai» et l'autre de rétorquer «je te supprimerai». Avec la gravité des échanges et la tournure des débats, le Président Abbas fut obligé de lever la séance pour arrêter la réunion. Il y eut les jours suivants plusieurs rencontres et conciliabules entre certains ministres pour trouver une issue à la crise sans résultat.

    Certaines de ces rencontres se passaient dans la même salle de réunion, d'autres dans les bureaux de certains ministres.

    Pour ma part tous les matins, à 10 heures, je me pointais dans la salle de réunion, attendant la reprise des discussions. Souvent j'assistais, sans y être invité, à certaines réflexions, points de vue ou analyses de ces responsables dont je bénéficiais de la pleine confiance, les fréquentant depuis la proclamation du GPRA.

    Le 10 Juillet 1959, Abbas revient avec la proposition suivante :

    Message aux chefs et aux comités de Wilaya.

    Au cours de la dernière réunion du Conseil des ministres, j'ai constaté qu'une crise grave avait conduit le gouvernement à l'impasse.

    N'ayant pu faire appel à l'arbitrage du Comité Permanent de la Révolution (2) et du Conseil National de la Révolution Algérienne dont la composition est contestée par certains, le gouvernement s'est trouvé paralysé.

    Dans ces conditions, je prends toutes mes responsabilités en tant que chef du gouvernement et je vous invite à vous réunir dans le plus bref délai, pour doter la Révolution d'un CNRA incontesté. Celui-ci sera alors habilité à :

    1°) recevoir la démission collective des ministres actuels;

    2°) investir un autre gouvernement;

    3°) donner à notre Révolution une nouvelle stratégie militaire, politique et diplomatique dignes de notre lutte d'indépendance et des grands sacrifices que cinq années de guerre ont imposés à notre peuple.

    Les ministres en exercice continueront à assurer leurs fonctions jusqu'à ce que le nouveau gouvernement ait reçu l'investiture. Le ministre des Forces armées est chargé de vous réunir et de vous communiquer le présent message.

    Mes collaborateurs et moi-même restons à votre disposition pour vous seconder dans votre mission et vous donner tous renseignements utiles à l'accomplissement de votre tâche.



    Fait au Caire le 10 juillet 1959
    Ferhat Abbas Président du GPRA



    Le texte du message a été adopté à l'unanimité des membres présents moins une abstention, celle de Benkhedda, et une absence, celle de Debaghine.

    C'est à partir de ce message qu'il y a eu la fameuse réunion des 10 colonels et que Benkhedda qualifie de 2ème coup d'Etat de la Révolution.

    Contrairement à tout ce qui a été raconté par la plupart des auteurs sur la Révolution Algérienne, cette réunion, malgré toute la gravité des propos échangés, s'est déroulée sans armes ni sur la table, ni sous la table, ni sur les personnes. En plein mois de juillet au Caire, la température avoisine les 40° et tous les membres présents étaient en bras de chemise, y compris le Président Ferhat Abbas.


    --------------------------------------------------------------------------------
    * Ancien responsable au MALG

    (1) Page 404, L'Heure des Colonels, Yves Courrière, Casbah Editions

    (2) Annexe 11, pages 136 et 137 «L'Algérie à l'indépendance, la crise de 1962" par Benyoucef Benkhedda, éditions Dahlab.
    valiant
    valiant
    Arif
    Arif


    Nombre de messages : 305
    Localisation : Quebec
    Date d'inscription : 21/05/2007

    La réunion du GPRA du 29 juin au 10 juillet 1959 Empty Re: La réunion du GPRA du 29 juin au 10 juillet 1959

    Message  valiant Dim 1 Juil 2007 - 20:45

    Conférence de Melun
    par Ali Chérif Deroua*

    Le 16 septembre 1959, le Général De Gaulle prononce une allocution radiotélévisée au Palais de l'Elysée, dans laquelle il énonce le principe fondamental de l'autodétermination pour régler le problème algérien avec trois solutions convenables à son avis, qui fera l'objet de la consultation.

    « Ou bien la sécession où certains croient trouver l'indépendance. La France quitterait alors les Algériens qui exprimeraient la volonté de se séparer d'elle. Ceux-ci organiseraient, sans elle, le territoire où ils vivent, les ressources dont ils peuvent disposer, le gouvernement qu'ils souhaitent. Je suis, pour ma part, convaincu qu'un tel aboutissement serait invraisemblable et désastreux...»

    «Ou bien la francisation complète, telle qu'elle est impliquée dans l'égalité des droits. Les Algériens peuvent accéder à toutes les fonctions politiques, administratives et judiciaires de l'Etat...»

    «Ou bien le gouvernement des Algériens par les Algériens appuyé sur l'aide de la France et en union étroite avec elle pour l'économie, l'enseignement, la défense, les relations extérieures...»

    Le 15 octobre 1959, l'assemblée nationale française approuvait, par 441 voix contre 23, la déclaration du gouvernement reprenant les thèmes du discours prononcé le 16 septembre.

    Le 20 novembre 1959, le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne désigne comme d'éventuels négociateurs de cette proposition, les leaders de la Révolution, Rabah Bitat, arrêté le 23 mars 1955 à Alger, et Hocine Aït Ahmed, Ahmed Benbella, Mohamed Boudiaf et Mohamed Khider, incarcérés en France depuis le détournement le 22 octobre 1956, de l'avion marocain qui les transportait de Rabat à Tunis.

    Entre-temps, contrairement aux militaires français, De Gaulle, en militaire, a apprécié différemment les résultats des opérations Challe. Dans une conférence de presse tenue à l'Elysée le 10 novembre 1959 il déclare, «en 1957 il y avait en Algérie, en moyenne, tous les mois 2.000 exactions de toutes sortes, en 1958 il y avait en moyenne par mois 1.600, en octobre 1959 il dépasse à peine 1.000». Pour des opérations censées briser une fois pour toutes la Révolution il était loin du compte.

    Mieux que quiconque, il était en mesure de ne pas partager les cris de victoire des officiers et officiels français, à savoir l'écrasement total de la rébellion et son anéantissement définitif.

    Ancien responsable de la résistance française, il ne pouvait en aucun cas ne pas reconnaître qu'un mouvement de libération ne peut jamais être vaincu et que les 1.000 exactions par mois en octobre 1959 sont un signe irréfutable que l'insurrection était loin d'être à genoux.

    D'autre part, De Gaulle, l'incarnation de la France, De Gaulle l'orgueilleux, De Gaulle l'homme du 18 Juin, De Gaulle le sauveur de la France, venait de subir un échec et un affront avec une tentative d'insurrection du 24 au 31 janvier 1960, avec l'occupation par les pieds-noirs de la faculté d'Alger de la Compagnie Algérienne (banque dévalisée par les manifestants) et du centre-ville, la complicité du Premier Régiment Etranger de Parachutistes (1er REP), des généraux Faure, Mirambeau, Gracieux et des Colonels Argoud, Broizat, Godard et surtout de l'abandon du pouvoir légal et la fuite à 45 km (caserne militaire de Réghaïa) des autorités civiles et militaires, à savoir Delouvrier, Délégué Général du Gouvernement français à Alger, et Challe, Commandant en Chef des Forces Armées en Algérie.

    Devant la tournure des événements et la gravité de la situation dans les deux camps, les deux antagonistes, De Gaulle et le GPRA, ne pouvaient que rechercher un début de contact à défaut de négociations pour faire avancer la solution du drame algérien.

    Intelligemment, le GPRA, par la voix de son représentant à New York, Abdelkader Chanderli, fait un appel du pied à la partie française avec une déclaration reprise par le journal Libération du 8 mai 1960 où il dit «le FLN est prêt dès demain à siéger avec le gouvernement français pour mettre au point un référendum libre en Algérie, mais ne pourra jamais laisser la France l'organiser... Nous acceptons l'autodétermination et en discuter l'application. Mais les Français demandent au FLN de déposer les armes et de les laisser organiser le référendum, ce que nous ne pouvons accepter. Nous voulons être certains que ce sera l'expression libre... Le référendum représente une forte proportion du peuple algérien...

    Le 14 juin 1960, le Général De Gaulle déclare de nouveau dans une déclaration radiotélévisée : «On ne conteste plus, nulle part, que l'autodétermination des Algériens quant à leur destin soit la seule issue possible de ce drame complètement douloureux... Une fois de plus je me tourne, au nom de la France, vers les dirigeants de l'insurrection. Je leur déclare que nous les attendons ici pour trouver avec eux, une fin honorable aux combats qui se traînent encore, régler la destination des armes, assurer le sort des combattants...»

    Le 20 juin 1960 le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne fera connaître sa décision, à savoir l'envoi d'émissaires, pour organiser les modalités du voyage en France, d'une délégation présidée par Ferhat Abbas.

    «Désireux de mettre fin au conflit et de régler définitivement le problème, le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne décide d'envoyer une délégation présidée par Ferhat Abbas pour rencontrer le Général De Gaulle».

    Une délégation d'émissaires est envoyée pour discuter des modalités des pourparlers. Présidée par Maître Ahmed Boumendjel, avocat de renom, ancien défenseur des leaders emprisonnés en France, ancien membre du bureau politique de l'UDMA, ayant rejoint le FLN début 1957 après l'assassinat de son frère Ali, avocat lui aussi, par les paras à Alger, membre du Conseil National de la Révolution Algérienne, ami et confident du Président Ferhat Abbas, elle était composée de Mohamed Benyahia, jeune et brillant avocat, directeur de cabinet du Président du GPRA, membre du Conseil National de la Révolution Algérienne, et de Rachid Hakiki, jeune cadre du MALG spécialiste dans les Transmissions et le Chiffre.

    La délégation qui a pris le matin du 25 juin, un vol Tunis Air à destination de Paris, a été transportée dès son arrivée, par hélicoptère à la préfecture de Melun où elle sera logée au deuxième étage du bâtiment. Elle subira une claustration complète imposée par les autorités françaises durant tout le séjour.

    Elle a été accueillie à la préfecture par M. Suel, directeur de cabinet du Secrétaire Général aux Affaires Algériennes auprès du Premier ministre M. Michel Debré, par ces mots : «Bienvenue à messieurs les plénipotentiaires». Ces mots ne sont pas tombés dans l'oreille d'un sourd.

    A 16 heures, les deux délégations tiennent leur première audience : du côté algérien, Boumendjel, Benyahia et Hakiki, du côté français Roger Moris, Secrétaire Général aux Affaires Algériennes auprès du Premier ministre, le Général Hubert de Gastines et le Colonel Mathon négociateur du voyage des commandants Si Salah, Si Lakhdar et Si Mohamed de la wilaya 4 à Paris, reçus le 10 juin 1960, par le Général de Gaulle pour négocier un cessez-le-feu. Monsieur Moris qui fréquentait Maître Boumendjel à Paris avant que celui-ci ne rejoigne la Révolution, ne put s'empêcher de lui serrer chaleureusement la main, oubliant peut-être qu'il avait en face de lui un adversaire, pire un ennemi politique.

    Ayant pris place l'un en face de l'autre autour de la table de négociations, Boumendjel en homme politique chevronné et avocat de valeur, déclare : «Une poignée de main pour l'amitié, un titre de plénipotentiaire pour la reconnaissance de notre Etat algérien, nos discussions commencent bien». Cette déclaration jeta un froid dans la salle. La conférence débuta sans autre cordialité.

    D'emblée, Maître Boumendjel, relayé par Benyahia, exposait la position algérienne :

    - envoi d'une délégation algérienne présidée par Ferhat Abbas Président du GPRA;

    - rencontre avec le Général De Gaulle;

    - Ferhat Abbas devrait prendre contact durant son séjour avec les médias, les milieux politiques français, les ambassadeurs étrangers accrédités à Paris;

    - il pourrait tenir des conférences de presse;

    - les délégués algériens demandent à rencontrer les leaders emprisonnés à l'île d'Aix.

    D'autre part, la délégation insistait pour connaître la composition nominative de la délégation française et leur rang et fonction.

    Elle demandait aussi que le président de la délégation soit un ministre.

    Au fur et à mesure que le temps passait, l'atmosphère devenait de plus en plus tendue, d'autant plus que toutes les demandes ou initiatives algériennes étaient rejetées par la partie française.

    Le 29 juin 1960, M. Moris remettait le communiqué suivant à Boumendjel : «les représentants du gouvernement ont fait connaître aux émissaires de l'organisation extérieure de la rébellion algérienne les conditions dans lesquelles pourraient être organisés les pourparlers en vue conformément aux propositions faites par le Général De Gaulle de trouver une fin honorable aux combats qui traînent encore, de régler la destination des armes et d'assurer le sort des combattants. Ces entretiens préliminaires étant terminés, les émissaires doivent repartir sont incessamment pour Tunis».

    Ainsi le 29 juin 1960 prit fin la conférence de Melun, première étape du processus de négociations officielles et publiques entre la France et le Gouvernement Provisoire de la République Algérienne. Cette rencontre peut être considérée à juste titre comme une reconnaissance de facto.

    Les autorités françaises ne pouvaient en aucun cas ignorer la qualité des plénipotentiaires algériens, Boumendjel, Conseiller politique du Président du GPRA, Benyahia, Directeur de Cabinet du même Président. Ils ne se sont pas présentés à l'ambassade de France et n'ont bénéficié d'aucun document ou autorisation de voyage pour rentrer et sortir du territoire français; leur voyage et leur séjour étaient annoncés publiquement par tous les médias français et internationaux; messieurs les plénipotentiaires était le terme adéquat pour les saluer.

    Aussi peut-on considérer que les premières négociations officielles entre la France et le FLN ont débuté le 20 juin 1960.

    Le 5 juillet, Ferhat Abbas prononça un discours très dur qui mit fin à cette lueur d'espoir d'une fin prochaine des hostilités : «Nous devons renforcer nos moyens de lutte et notre combat armé... L'indépendance ne s'offre pas, elle s'arrache... La guerre peut être encore longue».

    Depuis le départ de la délégation sur Paris, M. Mhamed Yazid, ministre de l'Information, demandait journellement à partir de Nez York, des instructions au Président Ferhat Abbas pour pouvoir agir.

    N'ayant rien à lui signaler, Abbas charge Abdelhafid Boussouf de prendre contact avec Yazid et de l'informer de la situation.

    Boussouf en compagnie de Mehri remettent alors un paquet, acheté à Khan Khalil, souk renommé du Caire, contenant les instructions à Abdelkader Chanderli de passage pour le donner à Yazid avec une consigne stricte : remise sans témoin.

    Arrivé à New York, Chanderli remet le paquet cylindrique à Yazid. Celui-ci l'ouvre et découvre une flûte devant un Chanderli éberlué. J'ai compris le message.

    Devant l'étonnement de Chanderli qui demandait : qu'est-ce que tu as compris ?

    Yazid déclare : la conférence de Melun n'a rien donné, on me demande de jouer ce que j'ai envie de jouer.

    Tombé entre les mains de n'importe quel service étranger, ce paquet n'aurait jamais pu être décodé ou décrypté.

    Cette anecdote démontre, s'il en est besoin, le degré de formation, de communion, de complicité et d'intelligence de ceux qui ont dirigé notre lutte de libération.

    Pour finir, j'aimerais donner le point de vue du Président Ferhat Abbas sur les trois hommes de droit cités dans ce document : Boumendjel, Benyahia et Yazid : Lorsque le GPRA est confronté à un problème, on le remet à Boumendjel si on veut le résoudre, à Benyahia pour le faire perdurer, à Yazid pour l'aggraver.

    NB:
    Cet article est extrait d'un livre qui sortira prochainement sur la lutte de libération.


    --------------------------------------------------------------------------------
    *Ancien responsable au MALG

      La date/heure actuelle est Lun 20 Mai 2024 - 1:49