Edition du 12 juin 2007 > Reportage
Les Etats-Unis. Loin des clichés et des idées reçues
La maison Amérique de l’intérieur
Vous arriverez aux Etats-Unis en tant qu’étranger, mais, nous l’espérons, vous repartirez en ami… » C’est comme cela que se termine le petit guide que le bureau des affaires éducatives et culturelles du Département d’Etat remet aux visiteurs internationaux, dès qu’ils atterrissent à l’aéroport de Washington.
Etats-Unis. De notre envoyé spécial
Plus de 4000 personnes, dont des journalistes, des hommes politiques, des acteurs associatifs et des enseignants issus des quatre coins du monde, sont invitées chaque année aux States pour un séjour de trois semaines. Le département d’Etat dégage 200 millions de dollars pour financer une multitude de programmes de formation académiques qui traitent de thèmes aussi variés que la sécurité internationale, la démocratie, l’immigration, la liberté d’expression et de la presse, la diversité et les droits de l’homme. Les participants ne mettent bien sûr pas la main à la poche. La présence des nominés reste l’objectif principal des think-thank du Département d’Etat qui pilote ces programmes. Pourquoi donc ces Américains dépensent autant de fric pour offrir des séjours académiques et touristiques à des Algériens, des Egyptiens, des Guatémaltèques et même des Timoriens qui n’ont, a priori, rien à offrir en contrepartie ? Raisonner ainsi serait, assurément, oser un blasphème à la première religion des Etats-Unis : le pragmatisme. L’Amérique et les Américains souffrent. Ils souffrent terriblement d’être mal aimés. Détestés, honnis et maintenant diabolisés, même après le passage très remarqué de Ben Laden à New York, un certain 11 septembre 2001… Ce terrible sentiment de solitude qui (re)gagne les Américains, accentue la peur et convoque, presque mécaniquement, le réflexe atavique de l’isolationnisme cher à Monroe. Les citoyens de cet immense pays veulent désespérément que le reste du monde les comprenne. Qu’il saisisse leur insoutenable mal-être. Celui d’être maudits partout sans trop savoir pourquoi. L’Américain « basic » que vous croisez devant la Maison-Blanche à Washington, en plein Manhattan, à New York ou dans la lointaine Arizona, est hanté par le même sentiment. Il formule les mêmes craintes et les mêmes interrogations sur cette américanophobie rampante qui s’est emparée du monde. Il s’échinera modestement à plaider sa cause à lui, de n’être pour rien dans ce que son gouvernement entreprend de détestable en Irak, en Afghanistan et ailleurs.
Bush and co.
C’est ce feed-back étonnant que vous recevrez dès les premiers mots échangés avec les Américains. Quel que soient leurs conditions, leur religion, leur sexe et surtout leur couleur. Pour la majorité ici, la politique étrangère des Etats-Unis semble n’avoir qu’une seule odeur : celle du sang. Cela suffit pour expliquer la fracture entre Washington et le reste du pays. « Bush is a criminal ! » (Bush est un criminel !). Cet adjectif peu glorieux à l’égard du président des Etats-Unis revient comme un refrain chez la majorité des Américains. Jamais, sans doute, un président de ce pays n’a été aussi vomi par son peuple. Le contraste est saisissant entre l’image, mais surtout les préjugés qu’on se fait, de loin, des Américains et de la réalité offerte en « live ». Sur ce plan, les habitants de ce pays très « complexe et compliqué », pour reprendre la formule de notre ami interprète André, semblent tout à fait en phase avec le reste du monde. Les administrations successives tentent justement d’exploiter la sympathie des citoyens américains pour vendre une image plus reluisante des Etats-Unis, que celle écornée par les errements politiques et les dérives guerrières de George Bush and co. C’est là toute la substance de ces programmes destinés aux visiteurs internationaux pour lesquels toutes les institutions politiques, économiques, culturelles, universitaires et autres sont mises à contribution pour vous apprendre à aimer ce pays. Il est bien sûr et par expérience difficile d’en sortir « indemne ». Comme dans un scénario hollywoodien, les concepteurs de ces programmes ciblent les esprits. Dès votre descente d’avion à l’aéroport Dulles de Washington, vous êtes illico conduits en pèlerinage à la Maison-Blanche (White House), au Capitol Hill (siège du Congrès) et aux différents monuments qui font la fierté des Etats-Unis. Vous voilà donc à quelques mètres du bureau ovale de George Bush… ! Comme dans une espèce de séance d’hypnose, vous êtes enivré, transporté dans un monde irréel, dans un monde de rêve. Le rêve américain grandeur nature… Mine de rien, vous vous sentez important ici. Toutes les portes s’ouvrent, y compris celles bien cadenassées du Congrès où se fait et se défait la politique des Etats-Unis.
Hi Condoleeza Rice !
Aller par exemple prendre une photo sur la chaise de Barak O’bama, le probable candidat des démocrates à la Maison-Blanche au siège de la commission des affaires étrangères du Sénat, est aussi simple que d’aller aux toilettes. Ici, dans cette salle, sans doute la plus importante du Sénat américain, le conseiller de l’autre probable candidat des républicains, celui-là, John McCain, se plie en quatre pour répondre à nos questions. Toutes ! Quand, journaliste, vous n’êtes pas forcément familier des salons feutrés des institutions et de certaines personnalités politiques dans votre propre pays, vous êtes tout de suite impressionné et happé par tant de soins, de sollicitude et d’égards que les officiels américains vous témoignent. Ne pensez surtout pas qu’ils se payent votre tête ou qu’ils vous prennent pour de misérables tiers-mondistes. Pour les stratèges de cette formidable opération de marketing politico-médiatique, l’enjeu est tellement vital qu’il ne faut rien laisser au hasard. Il va au-delà de George Bush, voire d’une génération. Le souci majeur étant de pouvoir exporter autant que faire se peut, les valeurs américaines aussi loin que possible de l’autre côté de l’Atlantique et du Pacifique. Pour les think-tank US, « The American way of life » vaut tous les sacrifices. Il vaut d’être vécu, ne serait-ce que 21 jours, mais surtout d’être partagé au-delà des Etats-Unis. C’est aussi cela le génie des Américains de vouloir et de pouvoir formater les têtes et les cœurs de leurs invités, tout en restant égaux à eux-mêmes, à leur réputation d’être libres. Sur l’esplanade située juste devant le siège de la Maison-Blanche, une vieille femme d’origine hispanique dresse depuis…1981 un bras d’honneur à George Bush et à tous ses prédécesseurs. C’est là, en plein jardin La Fayette, que Conception Piccioto a planté une misérable tente ornée de pancartes et autres écriteaux qui disent tout le « bien » que la vieille femme et son mari pensent de la politique étrangère des Etats-Unis. « Vous êtes des criminels ! », « Arrêtez de massacrer des innocents en Irak, et en Afghanistan ! », « Non à l’alliance des USA avec les sionistes ! » sont autant de slogans mis en évidence par cette petite femme courage au visage ratatiné, à une portée de fusil du bureau ovale… De fait, cette image spectaculaire, inimaginable en Algérie par exemple, est l’attraction des touristes du monde entier qui viennent ici découvrir une maison noire… juste en face de la « maison blanche ». A quelques mètres de là, des éléments de la police départementale de Washington suivent avec un regard amusé cette scène qui se répète des milliers de fois par jour. Comme si chacun fait son job, ici. Les flics surveillent d’éventuels débordements, le couple d’opposants dénonce la politique américaine et, un peu plus loin, George Bush travaille tranquillement dans son bureau… Voilà un décor simple qui convainc les plus retors de la réalité de la liberté et de la diversité aux Etats-Unis. Mais le clou du séjour pour les 200 journalistes participant au programme Edward R-Murrow des visiteurs internationaux, aura été la rencontre avec la secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères. Ce fut le 10 avril dernier, au siège du Département d’Etat. Pour cause, la dame la plus détestée au monde, arabe surtout, est là pour de vrai, devant nous, en ensemble jaune à rayures noires. Condoleeza Rice, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, est plutôt sympathique. Elle se fera un plaisir de répondre à nos questions et de s’épancher sur « ce pays extraordinaire par sa diversité qui permet à une jeune d’origine africaine comme moi d’être secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères ». Mitraillée de flashes et filmée de près, « Candy » présente son assistante, l’Egypto-américaine Dina Habib Powell, comme un bel « exemple » d’intégration et de diversité des Etats-Unis. Loin de l’image peu amène de la télévision, les journalistes d’origine arabe oublient l’arrogance cathodique de cette dame et dégainent leurs appareils photos pour immortaliser l’événement. Ici même, nous verrons défiler des sommités du journalisme américain, à l’image du grand Bob Woodward, l’icône et le « Lincoln » du Washington Post qui a fait démissionner l’ex-président Nixon en éventant le scandale du Watergate en 1973, ou encore Marc Withaker du Post également, John Miller, auteur du dernier entretien avec Oussama Ben Laden, actuellement porte-parole du FBI et David Bohrman de CNN. Un autre aréopage de personnalités, lié aux médias américains, répondra aussi aux questions des journalistes participants. L’on citera le porte-parole du fameux conseil de sécurité des Etats-Unis, Gordon Johndroe, l’ex-attaché de presse de Bill Clinton, Charles Fierstone, directeur de l’institut Aspen et Tom Rosenstiel, directeur du projet d’excellence en journalisme. Le débat a été parfois très tendu avec certains de ces illustres intervenants au sujet de la Palestine et de l’influence du lobby juif aux USA au point que ces derniers furent surpris de constater que la salle a voté contre la politique étrangère américaine, et au siège du Département d’Etat ! Ce fut du reste Bob Woodward qui s’est employé le premier à dépeindre George Bush dans son attirail de guerrier des temps modernes. Quittés les bâtiments officiels, Washington et toutes les villes des Etats-Unis à l’image de Syracuse (New York), Pentagone-City (Virginie) et Phoenix (Arizona), la politique étrangère cesse d’être la tasse de thé des Américains. Dans ce melting-pot où toutes les races du monde se côtoient, joyeusement, vous ne pouvez qu’embarquer dans ce train de vie en route vers le nouveau monde… Dehors, vous ne risquez pas d’être toisé ou arrêté par un flic ou autre autorité. Même si vous ne trimballez pas vos papiers, personne n’ose vous interpeller à moins que vous ne commettiez un acte répréhensible. Un sheriff de l’Arizona à qui nous avions posé la question, a répliqué : « Vous êtes fou, je vais me retrouver en taule si jamais je demandais les papiers à une personne, même si je suis sûr d’avoir affaire à un clandestin. Cela s’appelle le ‘‘profilage’’ (une sorte de délit de faciès) en langage juridique, et chez nous, c’est lourdement sanctionné ! » C’est que, aux Etats-Unis, chacun fait son bizness quelle que soit son origine, dans cette nation composée d’immigrés. On est loin des rafles des sans-papiers, si courantes à Paris et à Madrid.
Les Etats-Unis. Loin des clichés et des idées reçues
La maison Amérique de l’intérieur
Vous arriverez aux Etats-Unis en tant qu’étranger, mais, nous l’espérons, vous repartirez en ami… » C’est comme cela que se termine le petit guide que le bureau des affaires éducatives et culturelles du Département d’Etat remet aux visiteurs internationaux, dès qu’ils atterrissent à l’aéroport de Washington.
Etats-Unis. De notre envoyé spécial
Plus de 4000 personnes, dont des journalistes, des hommes politiques, des acteurs associatifs et des enseignants issus des quatre coins du monde, sont invitées chaque année aux States pour un séjour de trois semaines. Le département d’Etat dégage 200 millions de dollars pour financer une multitude de programmes de formation académiques qui traitent de thèmes aussi variés que la sécurité internationale, la démocratie, l’immigration, la liberté d’expression et de la presse, la diversité et les droits de l’homme. Les participants ne mettent bien sûr pas la main à la poche. La présence des nominés reste l’objectif principal des think-thank du Département d’Etat qui pilote ces programmes. Pourquoi donc ces Américains dépensent autant de fric pour offrir des séjours académiques et touristiques à des Algériens, des Egyptiens, des Guatémaltèques et même des Timoriens qui n’ont, a priori, rien à offrir en contrepartie ? Raisonner ainsi serait, assurément, oser un blasphème à la première religion des Etats-Unis : le pragmatisme. L’Amérique et les Américains souffrent. Ils souffrent terriblement d’être mal aimés. Détestés, honnis et maintenant diabolisés, même après le passage très remarqué de Ben Laden à New York, un certain 11 septembre 2001… Ce terrible sentiment de solitude qui (re)gagne les Américains, accentue la peur et convoque, presque mécaniquement, le réflexe atavique de l’isolationnisme cher à Monroe. Les citoyens de cet immense pays veulent désespérément que le reste du monde les comprenne. Qu’il saisisse leur insoutenable mal-être. Celui d’être maudits partout sans trop savoir pourquoi. L’Américain « basic » que vous croisez devant la Maison-Blanche à Washington, en plein Manhattan, à New York ou dans la lointaine Arizona, est hanté par le même sentiment. Il formule les mêmes craintes et les mêmes interrogations sur cette américanophobie rampante qui s’est emparée du monde. Il s’échinera modestement à plaider sa cause à lui, de n’être pour rien dans ce que son gouvernement entreprend de détestable en Irak, en Afghanistan et ailleurs.
Bush and co.
C’est ce feed-back étonnant que vous recevrez dès les premiers mots échangés avec les Américains. Quel que soient leurs conditions, leur religion, leur sexe et surtout leur couleur. Pour la majorité ici, la politique étrangère des Etats-Unis semble n’avoir qu’une seule odeur : celle du sang. Cela suffit pour expliquer la fracture entre Washington et le reste du pays. « Bush is a criminal ! » (Bush est un criminel !). Cet adjectif peu glorieux à l’égard du président des Etats-Unis revient comme un refrain chez la majorité des Américains. Jamais, sans doute, un président de ce pays n’a été aussi vomi par son peuple. Le contraste est saisissant entre l’image, mais surtout les préjugés qu’on se fait, de loin, des Américains et de la réalité offerte en « live ». Sur ce plan, les habitants de ce pays très « complexe et compliqué », pour reprendre la formule de notre ami interprète André, semblent tout à fait en phase avec le reste du monde. Les administrations successives tentent justement d’exploiter la sympathie des citoyens américains pour vendre une image plus reluisante des Etats-Unis, que celle écornée par les errements politiques et les dérives guerrières de George Bush and co. C’est là toute la substance de ces programmes destinés aux visiteurs internationaux pour lesquels toutes les institutions politiques, économiques, culturelles, universitaires et autres sont mises à contribution pour vous apprendre à aimer ce pays. Il est bien sûr et par expérience difficile d’en sortir « indemne ». Comme dans un scénario hollywoodien, les concepteurs de ces programmes ciblent les esprits. Dès votre descente d’avion à l’aéroport Dulles de Washington, vous êtes illico conduits en pèlerinage à la Maison-Blanche (White House), au Capitol Hill (siège du Congrès) et aux différents monuments qui font la fierté des Etats-Unis. Vous voilà donc à quelques mètres du bureau ovale de George Bush… ! Comme dans une espèce de séance d’hypnose, vous êtes enivré, transporté dans un monde irréel, dans un monde de rêve. Le rêve américain grandeur nature… Mine de rien, vous vous sentez important ici. Toutes les portes s’ouvrent, y compris celles bien cadenassées du Congrès où se fait et se défait la politique des Etats-Unis.
Hi Condoleeza Rice !
Aller par exemple prendre une photo sur la chaise de Barak O’bama, le probable candidat des démocrates à la Maison-Blanche au siège de la commission des affaires étrangères du Sénat, est aussi simple que d’aller aux toilettes. Ici, dans cette salle, sans doute la plus importante du Sénat américain, le conseiller de l’autre probable candidat des républicains, celui-là, John McCain, se plie en quatre pour répondre à nos questions. Toutes ! Quand, journaliste, vous n’êtes pas forcément familier des salons feutrés des institutions et de certaines personnalités politiques dans votre propre pays, vous êtes tout de suite impressionné et happé par tant de soins, de sollicitude et d’égards que les officiels américains vous témoignent. Ne pensez surtout pas qu’ils se payent votre tête ou qu’ils vous prennent pour de misérables tiers-mondistes. Pour les stratèges de cette formidable opération de marketing politico-médiatique, l’enjeu est tellement vital qu’il ne faut rien laisser au hasard. Il va au-delà de George Bush, voire d’une génération. Le souci majeur étant de pouvoir exporter autant que faire se peut, les valeurs américaines aussi loin que possible de l’autre côté de l’Atlantique et du Pacifique. Pour les think-tank US, « The American way of life » vaut tous les sacrifices. Il vaut d’être vécu, ne serait-ce que 21 jours, mais surtout d’être partagé au-delà des Etats-Unis. C’est aussi cela le génie des Américains de vouloir et de pouvoir formater les têtes et les cœurs de leurs invités, tout en restant égaux à eux-mêmes, à leur réputation d’être libres. Sur l’esplanade située juste devant le siège de la Maison-Blanche, une vieille femme d’origine hispanique dresse depuis…1981 un bras d’honneur à George Bush et à tous ses prédécesseurs. C’est là, en plein jardin La Fayette, que Conception Piccioto a planté une misérable tente ornée de pancartes et autres écriteaux qui disent tout le « bien » que la vieille femme et son mari pensent de la politique étrangère des Etats-Unis. « Vous êtes des criminels ! », « Arrêtez de massacrer des innocents en Irak, et en Afghanistan ! », « Non à l’alliance des USA avec les sionistes ! » sont autant de slogans mis en évidence par cette petite femme courage au visage ratatiné, à une portée de fusil du bureau ovale… De fait, cette image spectaculaire, inimaginable en Algérie par exemple, est l’attraction des touristes du monde entier qui viennent ici découvrir une maison noire… juste en face de la « maison blanche ». A quelques mètres de là, des éléments de la police départementale de Washington suivent avec un regard amusé cette scène qui se répète des milliers de fois par jour. Comme si chacun fait son job, ici. Les flics surveillent d’éventuels débordements, le couple d’opposants dénonce la politique américaine et, un peu plus loin, George Bush travaille tranquillement dans son bureau… Voilà un décor simple qui convainc les plus retors de la réalité de la liberté et de la diversité aux Etats-Unis. Mais le clou du séjour pour les 200 journalistes participant au programme Edward R-Murrow des visiteurs internationaux, aura été la rencontre avec la secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères. Ce fut le 10 avril dernier, au siège du Département d’Etat. Pour cause, la dame la plus détestée au monde, arabe surtout, est là pour de vrai, devant nous, en ensemble jaune à rayures noires. Condoleeza Rice, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, est plutôt sympathique. Elle se fera un plaisir de répondre à nos questions et de s’épancher sur « ce pays extraordinaire par sa diversité qui permet à une jeune d’origine africaine comme moi d’être secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères ». Mitraillée de flashes et filmée de près, « Candy » présente son assistante, l’Egypto-américaine Dina Habib Powell, comme un bel « exemple » d’intégration et de diversité des Etats-Unis. Loin de l’image peu amène de la télévision, les journalistes d’origine arabe oublient l’arrogance cathodique de cette dame et dégainent leurs appareils photos pour immortaliser l’événement. Ici même, nous verrons défiler des sommités du journalisme américain, à l’image du grand Bob Woodward, l’icône et le « Lincoln » du Washington Post qui a fait démissionner l’ex-président Nixon en éventant le scandale du Watergate en 1973, ou encore Marc Withaker du Post également, John Miller, auteur du dernier entretien avec Oussama Ben Laden, actuellement porte-parole du FBI et David Bohrman de CNN. Un autre aréopage de personnalités, lié aux médias américains, répondra aussi aux questions des journalistes participants. L’on citera le porte-parole du fameux conseil de sécurité des Etats-Unis, Gordon Johndroe, l’ex-attaché de presse de Bill Clinton, Charles Fierstone, directeur de l’institut Aspen et Tom Rosenstiel, directeur du projet d’excellence en journalisme. Le débat a été parfois très tendu avec certains de ces illustres intervenants au sujet de la Palestine et de l’influence du lobby juif aux USA au point que ces derniers furent surpris de constater que la salle a voté contre la politique étrangère américaine, et au siège du Département d’Etat ! Ce fut du reste Bob Woodward qui s’est employé le premier à dépeindre George Bush dans son attirail de guerrier des temps modernes. Quittés les bâtiments officiels, Washington et toutes les villes des Etats-Unis à l’image de Syracuse (New York), Pentagone-City (Virginie) et Phoenix (Arizona), la politique étrangère cesse d’être la tasse de thé des Américains. Dans ce melting-pot où toutes les races du monde se côtoient, joyeusement, vous ne pouvez qu’embarquer dans ce train de vie en route vers le nouveau monde… Dehors, vous ne risquez pas d’être toisé ou arrêté par un flic ou autre autorité. Même si vous ne trimballez pas vos papiers, personne n’ose vous interpeller à moins que vous ne commettiez un acte répréhensible. Un sheriff de l’Arizona à qui nous avions posé la question, a répliqué : « Vous êtes fou, je vais me retrouver en taule si jamais je demandais les papiers à une personne, même si je suis sûr d’avoir affaire à un clandestin. Cela s’appelle le ‘‘profilage’’ (une sorte de délit de faciès) en langage juridique, et chez nous, c’est lourdement sanctionné ! » C’est que, aux Etats-Unis, chacun fait son bizness quelle que soit son origine, dans cette nation composée d’immigrés. On est loin des rafles des sans-papiers, si courantes à Paris et à Madrid.