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    LE RAPPORT OCCIDENT-ORIENT

    valiant
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    Arif
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    Date d'inscription : 21/05/2007

    LE RAPPORT OCCIDENT-ORIENT Empty LE RAPPORT OCCIDENT-ORIENT

    Message  valiant Ven 8 Juin 2007 - 16:29

    LE RAPPORT OCCIDENT-ORIENT
    Quel débat culturel mondial?
    07 juin 2007 - Page : 19
    l'expression

    Il est vital de dialoguer avec l’Occident et de contribuer à corriger les dérives.


    La vision occidentale courante, et plus encore l’idéologie dominante aujourd’hui semblent être caractérisées par l’exclusion de la question de la culture de l’autre différent, ce dernier perçu comme l’éternel barbare. D’un autre côté, les préjugés au sujet de l’Occident restent vivaces. Certes, le thème du dialogue des cultures semble préoccuper de nombreux acteurs internationaux, mais la réalité est autre. Les dimensions, sens et logique, unité et pluralité, sont considérées comme incompatibles; sans liens, elles ne convergent pas. Malgré les avancées multiples de la condition humaine, et même s’il reste encore, en Occident comme en Orient, et selon leur forme propre, des traces de sens et de logique, la crise est, aujourd’hui, visible pour ce qui touche à la perception universelle du droit à la différence, du sens, de la vérité, de la liberté et de leurs enjeux. L’Occident cherche à imposer au monde entier une vision du monde ambivalente, source parfois de richesses, mais aussi, pour certains aspects, sans fondements ni horizons. Et l’Orient semble se contenter d’une tradition, en déphasage par rapport aux défis de notre temps.

    Une seule solution: la créativité

    En rive Sud, par-delà les contradictions et les nombreuses faiblesses, des valeurs humaines persistent, malgré tout. Le problème réside en particulier dans ce qui est communément appelé depuis plusieurs siècles, «la fermeture des portes du libre effort de raisonnement» ou ijtihad, fermeture jadis provoquée, à la fois, par la violence mongole, par la sortie de l’Andalousie et par la rupture entre la raison et la foi, cela a eu pour conséquence une difficulté de la pensée à s’affirmer pour tenter de relever les défis. Comment, en effet, apprendre à saisir ce qui se passe à notre époque, sans prêter le flanc? Ainsi, il nous faut le reconnaître, les sociétés du Sud réagissent mal, sont dominées, dans une phase de repli: Cela, en dépit des tentatives de renaissance et d’une capacité certaine à faire l’Histoire, comme l’ont montré les mouvements de libération et de décolonisation, comme l’attestent encore les traces de la culture de la résistance. Les sociétés de la rive Sud résistent plus que toutes les autres aux dérives de la modernité occidentale, même si elles commencent, à leur tour, elles aussi, à dériver, à être ébranlées dans leurs fondements. Cependant, la vie des gens reste attachée à des valeurs fondatrices qui ne sont pas encore entièrement écrasées par l’époque, mais jusqu’à quand? L’Occident, malgré de prodigieux progrès, semble entraîner tous les autres mondes dans «l’épuisement de l’humain», la sortie des valeurs humaines de la Cité, vers une sorte de destination inconnue. Bien sûr, il n’est pas question de culpabiliser l’autre, de dénigrer sa trajectoire, ni de ressusciter un Orient imaginaire, mais de garder ses distances critiques au regard de l’uniformisation, de l’hégémonie.
    Vu que le devenir est commun, il est urgent de rechercher et d’approfondir le dialogue avec l’Occident, car le vrai dialogue, le débat serein sont insuffisants. Malgré la prolifération des colloques sur ce sujet, le chemin semble long. Signalons, au passage, que les peuples du Sud et les peuples européens appartiennent dans une grande mesure à une même histoire. À notre époque, le débat est faussé, extrémisme de groupes d’un côté, hégémonie de certaines puissances de l’autre. Certes, l’extrémisme est un délire, une réaction irréfléchie face aux injustices et aux contradictions de la modernité. C’est là un des problèmes contemporains des citoyens du Sud, même si cela est perpétré par une infime minorité d’entre eux, les attitudes rétrogrades et des horreurs sont commises en leur nom. Alors, dans ce contexte, comment revivifier en rive Sud, l’acte de penser de manière critique, rationnelle et moderne, sans perdre de vue l’éclairage du sens et des valeurs spécifiques? Les valeurs signifient, avant tout, le sens de la vie et le sens des relations humaines. Une dimension humaine doit caractériser les relations entre les gens. Comment préserver le sens de la vie qui nous est propre et la dimension humaine vitale, sans favoriser les formes multiples du fétichisme et nouvelles de la violence, de l’aliénation et des subjectivités non maîtrisées? Dans le monde entier, du fait de la faiblesse de la pensée et du dialogue, la tendance générale est au repli, à l’intolérance, au recul de l’aptitude à intégrer et à assumer l’autre différent, à des formes inquiétantes de déshumanisation. En somme, nous nous heurtons, de plus en plus, à la difficulté de vivre raisonnablement ensemble, et par-là, à donner du sens à notre monde. En traitant de la question de l’autre, il ne s’agit pas de chanter les vertus de l’altruisme, d’imaginer un angélisme politique ou de dessiner les lignes forces de la cité idéale cosmopolite, mais de garder les yeux ouverts sur l’avenir qui se dérobe, pour tenter de penser et de vivre notre destin moderne.
    Surtout pour les sociétés de la rive Sud, comme en panne de projet, malgré nos atouts. Les antagonismes, les agressions et les répressions subies, comme en Palestine et en Irak, les idéologies de l’exclusion, la politique des deux poids et mesures, aggravent la situation créée par la mondialisation. Le racisme, le déni de justice vis-à-vis de l’autre, le recul du droit semblent marquer les relations entre les peuples, signe que la question du sens du monde se pose de manière pressante.
    Dans ce contexte, quelques travaux philosophiques et sociologiques, anciens et récents, de notre histoire commune et différente, tentent de situer les questions dans la perspective d’une convergence entre l’Orient et l’Occident, pour tenter d’analyser et de comprendre le rapport à l’autre et à la mondialisation. En restant à distance, autant que faire se peut, des intérêts étroits, des crispations et des polémiques qu’engendrent la méconnaissance, les préjugés et les manipulations, il est vital de dialoguer avec l’Occident et de contribuer à corriger les dérives. Car le progrès appartient à tous et ne revient à personne. En sachant bien qu’il existe, aujourd’hui, une situation contextuelle mondiale de lutte dans la politique, la pensée, la culture est écrasée par la logique marchande. Dans cette situation complexe, la vérité objective et, partant, les conditions de l’universalité sont en jeu, notamment pour ce qui concerne les relations des peuples avec l’Occident qui est en train de se généraliser à toute la planète.
    Paradoxe de l’Occident: il cherche à imposer de l’extérieur, le changement qui convient à ses intérêts étroits. Pourtant, il semble, de plus en plus, lui-même privé de repères normatifs. En effet, la culture qu’il propose se limite, pour l’essentiel, à la fois à une dépolitisation et à la généralisation des libertés marchandes et de l’esprit non spirituel, faits qui remettent radicalement en cause non seulement le sens abrahamique de la vie, mais aussi le sens «universel» de l’existence.
    Or, pour repérer et, si possible, démêler les difficultés, le chemin passe par «la belle lumière du dialogue», par la pensée méditante, par la raison raisonnable. L’avenir des peuples de la rive Sud, en particulier, et celui de tous les peuples, en général, dépend de la capacité à dialoguer, de la validité du sens que l’on accorde à la relation à l’autre différent. C’est ce qui est en jeu pour tous ceux qui désirent revenir, sans passéisme, à la fraîcheur originelle de leurs valeurs, qui veulent retrouver une proximité avec l’origine pour pouvoir se projeter dans l’avenir. C’est précisément cette question du sens que certains en Occident refusent de re-poser. Pour y faire face: la créativité par le débat et non le repli, est la solution. À l’évidence, le contexte et l’époque sont préoccupants et en même temps, porteurs d’opportunités. L’universel et le droit à la différence sont menacés de toutes les manières possibles, par des prétentions, par des monopoles, et, au même moment, il est possible d’inventer une nouvelle civilisation commune. C’est là, une forte raison de revenir aux sources, mais de le faire d’une façon critique et objective, pour se projeter dans l’avenir. L’Occident et l’Orient de notre temps semblent, sur ce point, avoir perdu la lumière.

    Comment vivre avec les autres?

    Si l’on veut, dans le contexte de la pensée moderne, retrouver le sens du droit à la différence et de la liberté, et non pas seulement des libertés comme franchises au service d’intérêts conjoncturels, il est impérieux de donner la priorité au débat et au savoir. Le déchaînement de l’intolérance, nourri par les violences du marché, option de l’Occident, tend à contester l’évidence que chaque individu est différent, comme chaque groupe, comme chaque peuple. Emmanuel Levinas, penseur contemporain de la question du rapport à l’autre, définit l’éthique comme une catégorie du discours confronté à la question infinie de la différence: la relation avec l’autre est une relation qui n’en a jamais fini avec l’autre, une différence qui est une non-indifférence, et qui va au-delà de tout devoir. Aristote, quant à lui, nous dit que «l’homme heureux a besoin d’amis». C’est encore plus vrai si les amis en question appartiennent à une autre culture, à une autre société. Des concepts à ce niveau semblent s’opposer, alors que sans doute, ils sont complémentaires: amis et frères. La fraternité se veut un concept issu de la culture monothéiste, l’amitié, un concept de la culture grecque. L’amitié renvoie à une politique de distance horizontale, la fraternité est dédiée d’abord sous le signe du vertical qui rassemble. L’amitié semble reconnaître la distance qui nous sépare de l’autre. La fraternité se déploie par-delà cette distance. Dans le contexte d’un improbable avenir, que doit-on faire pour apprendre à vivre avec les autres et coexister avec l’Occident? La morale et la justice devraient être la philosophie première. La reconnaissance de la singularité et le respect de l’autre conditionnent tous les autres rapports. Est incontournable le fait que l’on doit respecter la différence, la singularité, le mystère. Il y a lieu de reconnaître ces liens, d’une part, et de veiller, d’autre part, à ce que l’autre ne soit pas diminué, exploité, exclu. Il est clair que la question se pose plus que jamais dans la dureté de notre monde que l’Occident cherche à imposer à tous.
    A l’heure de la dictature du Marché et du retour des xénophobies qui dévoient le progrès et contredisent les valeurs de la relation humaine, au Nord, et à l’heure des mouvements du repli, au Sud, qui contredisent le droit à la liberté, le débat entre tous ceux qui acceptent naturellement à vivre ensemble la mondialité, dans le respect de la différence, peut être salutaire. Le débat doit s’effectuer de manière réfléchie, ouverte et vigilante. Car il ne s’agit pas seulement de culture spécifique, ou de prospérité à partager, mais de la possibilité même de préserver ce qu’il y a d’humain en chacun des peuples, qualité qui est remise en cause par le mouvement général de notre temps. Que veut l’Occident, et que voulons-nous? Plus que jamais, il est temps de se poser la question et accepter le débat. Il n’y a pas d’alternative.




    Mustapha CHÉRIF

      La date/heure actuelle est Dim 19 Mai 2024 - 19:49