Après la mort des 3 membres de l’équipage dans un crash en italie
La colère des pilotes d’Air Algérie
Par : Samar Smati
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Un avion-cargo d’Air Algérie s’est écrasé, dans la nuit de dimanche à lundi, dans la région de Piacenza, en Italie, tuant les trois membres de l’équipage. Les vols de la compagnie ont connu des perturbations hier en raison d’un mouvement spontané des pilotes. Le Syndicat des pilotes de lignes algériens (SPLA)
en appelle à l’intervention du président de la République.
Le quadrimoteur de type Hercule Lockheed L-382, qui assurait la liaison AH 2208 entre Alger et Frankfurt en Allemagne, s’est écrasé dimanche à 18h15 GMT, soit à 21h15 heure locale italienne et 19h15 heure algérienne, dans une zone inhabitée de Besurica, aux portes de la ville de Piacenza, au sud de Milan. Les trois membres de l’équipage sont tous décédés. Il s’agit du commandant de bord Abdou Mohamed, qui était instructeur avec 21 ans de service, du copilote Bedrina, ce dernier préparait sa retraite après 35 ans de service, et du mécanicien navigant.
Les causes de l’accident ne sont pas encore connues. Aucune source n’a pu établir dans quelles circonstances le drame s’est produit. Selon le communiqué de la compagnie aérienne, “la cellule de crise installée à cet effet ne dispose pas encore de toutes les informations liées à ce regrettable évènement”.
L’appareil avait décollé vers 18h15 et devait se poser vers 21h30 en Allemagne. Il semble, selon différentes sources, que l'équipage a contacté, vers 20h10, la tour de contrôle de Milan pour annoncer qu'il perdait de la puissance sur un moteur et qu'il était obligé de descendre. À en croire d’autres, ce sont les quatre moteurs qui ont posé problème. Cinq minutes plus tard, l’avion se crashait. Roberto Reggi, le maire de Piacenza, a qualifié de “miracle” le fait que l'avion soit tombé dans une zone inhabitée. La chute de l'appareil sur la ville aurait, selon lui, “provoqué immanquablement un désastre”. Certains pilotes estiment que “l’équipage a dû dérouter l’avion sur la zone inhabitée pour éviter la catastrophe une fois établi le constat que la situation était désespérée”. Il semble, selon les informations recueillies à l’aéroport d’Alger, qu’Air Algérie ait envoyé à Milan un pilote et un mécanicien afin de se rapprocher des autorités italiennes. Nul responsable n’a été en mesure de confirmer l’information.
Air Algérie a installé une cellule de crise “conformément” à la procédure. Celle-ci, composée des directeurs centraux, était réunie, hier, sous la direction de Tayeb Benouis, le P-DG de la compagnie, à l’aéroport international d’Alger Houari-Boumediene.
Le SPLA a été “exclu”, selon ses membres, d’en faire partie. “En tant que représentants de la corporation, nous nous sommes rendus au niveau de la cellule de crise. Nous avons été gentiment priés de vider les lieux”, a indiqué le vice-président du SPLA. Il nous a été impossible de joindre hier la direction générale, ni les responsables de la communication de la compagnie. “Il faut un rendez-vous pour voir l’attaché de presse”, nous a-t-on répondu au siège d’Air Algérie. La cellule de crise était, par ailleurs, injoignable par téléphone, que ce soit à la place Maurice-Audin ou à l’aéroport Houari-Boumediene.
Vols perturbés et crise déclarée
Le planning des vols, que ce soit sur les réseaux domestique ou international, a connu des perturbations en raison d’un mouvement “spontané” du collectif des pilotes d’Air Algérie. Les haut-parleurs de l’aéroport indiquaient que certains vols connaissaient des “perturbations” en raison d’un mouvement des “services techniques”. Dans un communiqué, Air Algérie précise que les perturbations font suite à “l'arrêt intempestif d'une partie de son personnel navigant”.
Le secrétaire général du SPLA a précisé qu’il ne s’agissait pas d’une grève. “Le syndicat n’a rien décidé. Il s’agit d’un crash qui a entraîné la mort de trois de nos frères. Il y a un mouvement spontané. Les gens sont choqués et à bout”, a indiqué M. Hammoud. Certains vols ont enregistré un retard important. D’autres ont été annulés, à l’instar des deux vols assurant la liaison Paris-Alger et Paris-Constantine, selon l’AFP, en raison d’un arrêt de travail “sans préavis de quelques pilotes”.
À Alger, certains pilotes ont également refusé d’assurer leur vol. Ces derniers excédés, certains étant sur place depuis l’annonce du crash la veille, ne mâchent pas leurs mots. “Crash après crash, mort après mort, la situation ne change pas. C’est inacceptable et inadmissible”, a dénoncé un pilote. “On en a marre du bricolage. On ne veut plus enterrer nos collègues”, s’exclamera un autre. Un membre d’équipage dira pour sa part que “les incidents se suivent, les commissions d’enquête et les recommandations également, mais rien ne change”.
En milieu d’après-midi, 16 pilotes étaient concernés par le débrayage. Les responsables de la compagnie ont saisi des huissiers de justice pour contrôler la “défection” des pilotes. L’information a été confirmée par des sources sécuritaires sur place. Une situation que dénonce le SPLA.
Le climat était d’ailleurs très tendu. Les pilotes, membres du SPLA, dénonçaient hier “le peu de considération” de la direction générale. “Personne n’est venu voir le collectif de la compagnie, mis à part Abdelmajid Sidi-Saïd. Nous demandons un signal fort des pouvoirs publics”, a déclaré M. Boukazoula, vice-président du syndicat.
Les responsables du SPLA en appellent à l’intervention du président de la République pour établir et définir les responsabilités. “Cet incident n’est pas le fruit du hasard. Il n’est pas fortuit. Il y a toute une chaîne pour arriver à faire s’écraser un Hercule avec 4 réacteurs. Il y a aujourd’hui une défaillance dans la gestion de l’entreprise, que ce soit au niveau du matériel ou du facteur humain”, dénonce l’un des responsables du syndicat.
En juin 2003, un Boeing 737 reliant Tamanrasset à Alger s’est écrasé au décollage faisant 102 morts. En l’espace de six mois, il s’agit du troisième incident consécutif. “C’est quoi cette série ?” s’est exclamé un membre du SPLA. Au mois de mars 2006, la jambe de train d’un avion s’était cassée à Séville, sans entraîner de dégâts majeurs. Un incident a également touché un Hercule au niveau de l’aéroport d’Alger. Malheureusement, le crash en Italie a entraîné mort d’homme.
Samar Smati